Histoire vraie : fantaisie & magie dans un château XIIIème siècle

Juillet 2021

Etrangement, j’arrive au Château de Mauriac par une route jamais empruntée auparavant. L’émotion est là présente depuis mon départ de Bordeaux… Les retrouvailles avec le Château et les paroles de Bernard qui résonneront dans mon cœur m’amènent à des rêveries.

Irais-je dans son atelier ou resterais-je dans la cour carrée ?

L’intensité est présente. Entendrais-je autre chose que le murmure des oiseaux et le vent dans les arbres ? L’opéra qui me touche profondément et me permet de voir s’interposer avec joie des images de bal dans mon imaginaire, sera-t-il toujours là pour animer la cour carrée et m’accueillir comme à chaque venue ?

Plus je m’approche du château, le découvrant déjà au loin, plus je me retrouve interpellée par cette route sinueuse. Pourtant, elle m’est inconnue et les paysages alentours également. En tout cas, avec mon regard posé sur la colline et mes mains sur le volant, c’est ce qu’il me semble. « C’est la première fois que je navigue de ce côté-là », pensais-je. A cet instant, une mémoire douce et tendre se réveille… Le mystère d’un écho se fait entendre et se dissipe… Et je sens l’heureuse bénédiction d’un voile qui se déchire.

Château de Mauriac

La dernière fois que j’avais retrouvé Bernard Bistes, il m’avait fait vagabonder parmi ses toiles… Quoi de plus merveilleux qu’un champ parsemé d’œuvres toutes aussi sublimes les unes que les autres pour promenade, coucouner par les murs d’un château enchanté et les mots rieurs d’un ami !

La prairie avait un autre goût et m’apparut sous une autre définition. Bernard s’enthousiasmait devant les fleurs et paysages qu’il me faisait découvrir dans une pièce de son château. Un an auparavant, un tableau avait tout particulièrement attiré mon attention et je le scrutais depuis que je l’avais vu une fois dans son atelier, avant les travaux. Il n’y était pas. Son œuvre était tellement grande qu’elle touchait presque le plafond du château… Plusieurs tableaux de nus, dont le tableau du couple, étaient posés nonchalamment sur devant, cachant le pied. Elle n’avait pas assez de place dans cette pièce d’exposition pour qu’elle soit mise en valeur. Peut-être était-il parvenu dans un autre demeure, celle d’un homme ou d’une femme qui aurait eu le coup de cœur pour cette œuvre, un arbre immense et léger à la fois, tout en finesse, comme à l’accoutumée du peintre, avec des milliers de précieuses fleurs blanches… Bernard l’avait peut-être simplement rangée. Cela faisait plusieurs mois qu’il avait eu besoin de mettre de l’ordre dans ses toiles et de les disposer dans un autre endroit… Un augure ?… Nous étions en novembre 2019. Je l’embrassais tendrement avant de repartir, pensant revenir plus précocement que ce que la vie me permit.

Un an plus tard, en novembre 2020, je pensais fortement à lui au point où je voulais lui téléphoner et lui parler de ma venue au printemps. Puis, je me suis ravisée pour ne pas le déranger, l’imaginant inspiré, parti dans ces fantaisies et espiègleries autant que dans les profondeurs de ses toiles et de l’attention qu’il porte aux couleurs… Un coup de pinceau trempé dans une coloration orangée et toute son œuvre était métamorphosée par quelques soupçons d’un trait de couleur.

Bernard Bistes
Château de Mauriac

Surprise dans mes rêveries, l’écho sur la route revient à moi. Je fis le lien avec la route empruntée pour la toute première fois…

Oui, je la connais.

Oui, je l’ai déjà vue avec une autre perspective.

Je me suis retrouvée en quelque sorte de l’autre côté du décor. J’étais dans sa toile… Je l’ai vue avec Bernard, depuis la fenêtre de son atelier et depuis sa toile qu’il finalisait devant mes yeux, me demandant de ne pas bouger et de m’installer sur un fauteuil, pendant que je trépignais intérieurement, l’observant de toutes mes attentions, voyant ses allers-retours entre sa toile qu’il pensait avoir fini et les multiples pots de peinture qu’il refermait et rouvrait merveilleusement… dans un souffle détendu.

Le mois de novembre devint finalement assez symbolique, entre nous, puisqu’en novembre 2020, sans la possibilité de venir lui dire au revoir à son enterrement (contraintes covid empêchant d’être présent pour honorer un ami et un peintre magique, unique & magnifique), quelques jours après mon envie de lui téléphoner, il se délivra de son corps et de toute cette matière, laissant des souvenirs et des moments de complicité.

Aller jusqu’au bout de ses rêves et de ses envies sera le message final que Bernard m’adressa par delà le visible, lui qui déplaça les montagnes pour remettre à l’honneur ce château templier et qui finalisa une partie importante, le point culminant, au-delà du corridor. Appeler un ami sans préjuger de nous demander si nous le dérangeons ou pas… Je connaissais la meilleure heure pour l’appeler mais point l’heure de sa mort, ni des jours précédents qui l’y ont conduit.

Après ces si longs mois de patience avant de pouvoir enfin revenir au château, j’entrais et je retrouvais le château intact. Il ne s’était pas effondré, même si maître était parti l’éclairer depuis le ciel et devenir une étoile flamboyante pour raviver toutes les couleurs dont nous avons besoin.

Les mots écrits dans son livre « De l’intériorité à la gesticulation – Peinture & Décoration » seront les derniers que j’entendrais de lui. Cela fait longtemps que je voulais me l’offrir. Il le remaniait encore et encore, le réimprimant pour améliorer la précédente version. Grâce à son livre, j’ai découvert son œuvre «  l’anti-narcisse ». Quand il me donna carte blanche pour utiliser l’œuvre de mon choix pour deux de mes livres, je savais où plonger…

Je suis heureuse d’avoir patienté pour me l’offrir… Je n’ai pas sa dédicace à l’entrée des premières pages, mais je reçois son œuvre finale. Je suis sure qu’il y a laissé des trésors et même plus. Merci à Emmanuel pour continuer dans le raffinement.

Nous connaissons et savons quand nous vivons une première fois… Quant à la dernière, elle ne s’annonce qu’après.

A visiter également pour un merveilleux moment avec le guide qui vous parlera autant du château que du Maître des lieux qui lui a rendu sa majesté.

Au revoir Magicien. A desuite Chevalier ! Et merci pour ce joli conte de fée du réel et toutes les anecdotes partagées.

Lire les articles précédents sur Bernard Bistes :

Tendresse,

Carole

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https://www.chateaudemauriac.com/

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Expression Corporelle & Artistique Espace Chrysalide

Ecrits par © Carole, rêveuse, conteuse, poète, conférencière, accompagnement (Bordeaux ou skype-téléphone), distributrice de paillettes camerawoman pour les bonnes causes & Fondatrice de l'Espace Chrysalide Bordeaux Chartrons Bacalan Saint Louis - Contact : espacechrysalide@outlook.com

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